Stephen Robbins est professeur à l'université de San Diego (Californie). La qualité de ses ouvrages de management et de comportement organisationnel en a fait un auteur incontournable de renommée internationale. Parmi ses domaines de recherche : conflit, pouvoir et comportements politiques au sein des organisations. Il est l'auteur chez Pearson de Management et Comportements organisationnels.
De passage à Lyon, il a rencontré, cet été, Christophe Lenne, notre responsable éditorial et nous a accordé à une interview.
Stephen Robbins et Christophe Lenne lors de leur rencontre à Lyon
1) La force de votre ouvrage Management réside dans le fait qu'il s'adresse à tous les acteurs de l'organisation et à tous types d'organisations. En quoi était-ce important pour vous ?
Stephen Robbins : Quand j'ai commencé à rédiger la première édition du livre, j'ai été frappé par le fait que la plupart des écrits en management ne reposaient que sur de grandes sociétés et des postes de cadres dirigeants. La réalité veut que les étudiants démarrent souvent leur activité dans des entreprises de petite taille, des organismes à but non lucratif, des organisations gouvernementales, et d'autres de ce genre. Par ailleurs, peu d'entre eux finiront par occuper des postes de Président ou Vice-Président d’une société. J’aime à penser que mes lecteurs sont plus enclin à devenir les futurs « directeurs marketing régionaux ». Cette perspective m’a poussé à écrire le livre en y incluant des exemples de tout type d’organisations et en y englobant tous les acteurs, de l’agent de maîtrise œuvrant sur le terrain jusqu’au P.-D.G. d’une société, en passant par tous les niveaux intermédiaires de responsabilité.
2) Vous vous livrez dans cet ouvrage à une analyse des dernières tendances : l’environnement externe et ses enjeux pour le manager, les facteurs déterminants un comportement éthique, l’impact du télétravail sur le management et l’organisation, l’importance de la culture d’organisation, etc. Quel regard portez-vous sur l’évolution du management ces dernières années ?
Stephen Robbins : Les deux évolutions sur lesquelles je me concentre particulièrement sont (1) la tendance à ajouter des responsabilités managériales à des postes opérationnels et (2) les innovations de rupture. La première a des répercussions énormes sur les étudiants en management. Cela signifie que nous devons nous assurer que tous les étudiants, indépendamment de leur spécialité, comprennent la fonction managériale. Je pense aux étudiants en marketing, en comptabilité, en finance, en informatique, qui pensent souvent qu’il n’est pas important pour eux de suivre des cours de management. En ce sens, j’essaye de faire ressortir clairement dans mes écrits l’intérêt du management pour tous les étudiants. Ils s’apprêtent à travailler en entreprise. Ils se doivent de savoir comment gérer leur travail et celui de leur équipe, et également de comprendre les objectifs et processus du management d’entreprise. Parallèlement à cela, les prochaines éditions de Management aborderont l’importance de comprendre et de tenir compte des innovations de rupture qui vont concerner la plupart des organisations. Les managers doivent comprendre comment les innovations de ruptures peuvent affecter leur environnement concurrentiel et étudier la meilleure façon d’y répondre.
3) Best-seller traduit en 19 langues, Comportements organisationnels, votre autre ouvrage tout aussi célèbre, a déjà accompagné plus de cinq millions d’étudiants dans le monde et est considéré comme le manuel de référence de la discipline. A quoi, selon vous, lui doit-on ce succès ?
Stephen Robbins : Je pense qu'un certain nombre de facteurs ont contribué au succès de mon livre Comportements organisationnels : (1) Les étudiants et les universitaires font régulièrement des remarques sur mon style d'écriture. J'utilise un style conversationnel qui rend mes ouvrages facilement accessibles. J'utilise également de nombreux exemples. Les étudiants semblent retenir plus facilement les exemples pratiques que la théorie. (2) Des sujets d'avant-garde. J’ai toujours essayé de me distinguer de la concurrence en traitant dans mes ouvrages des questions actuelles. J’étais, par exemple, le premier à traiter des sujets comme le conflit, la négociation, le pouvoir, la politique organisationnelle et les émotions dans un manuel de comportements organisationnels. (3) Equilibre entre théorie et pratique. Les premiers ouvrages concurrents accordaient une place très importante à la théorie. J’ai appliqué ma philosophie du "et alors ?" en écrivant mon livre Comportements organisationnels. Je tenais à ce que les étudiants comprennent pour quelle raison un sujet était important et la façon dont ils allaient pouvoir s’en servir. (4) Enfin, je dois beaucoup à mon éditeur - Prentice Hall/Pearson - il a fait connaître le livre et a fourni des compléments remarquables pour soutenir l'utilisation du livre en classe.
4) La 16e édition de Comportements organisationnels rend particulièrement compte des recherches et des évolutions les plus récentes du domaine. Quelles sont-elles précisément ?
Stephen Robbins : Cette 16e édition rend compte de l’évolution dans la composition des effectifs, des conséquences de la mondialisation sur le travail, de l’impact des nouvelles technologies sur le lieu de travail, et de l’importance de la culture organisationnelle sur les comportements au travail. Elle fait part, également, des recherches les plus récentes sur des sujets de comportements organisationnels plus traditionnels tels que la personnalité, le leadership, la motivation et les groupes au sein de l’organisation.
5) Quels conseils en management et en comportement organisationnel prodigueriez-vous à un jeune étudiant en passe de devenir lui-même un manager ?
Stephen Robbins : C'est en forgeant qu'on devient forgeron. Vos manuels vous apportent les fondamentaux. Ils vous donnent des notions sur le fonctionnement des organisations et sur les comportements humains. Utilisez vos premiers emplois et stages pour bâtir votre expérience. Portez une attention toute particulière aux personnes perçues comme de « bons managers » et de « bons employés ». Qu’est ce qui fait que les membres de l’entreprise les considèrent comme des personnes « hautement performantes » ? A l’inverse, observez quels sont les managers et employés « les moins performants ». Que font-ils ? Cela vous aidera à comprendre la culture de l’entreprise et comment cette dernière réagit face à des niveaux de performance divers. Retenez toutefois qu’un employé hautement performant dans une entreprise ne l’est pas forcément dans une autre. Les entreprises diffèrent les unes des autres sur leurs valeurs et leur système de récompenses. Plus tôt vous distinguerez les comportements qui sont encouragés de ceux qui ne le sont pas, plus tôt vous vous adapterez dans l’entreprise et plus vite vous évoluerez.
Les deux ouvrages phares de Stephen Robbins, Management – L’essentiel des concepts et des pratiques (10e édition, août 2017) et Comportements organisationnels (18e édition, juin 2018) ont été traduits, adaptés et publiés en français par Pearson.